Qu’une entreprise de l’Alberta veuille stocker au Québec des GES est-il une bonne ou une mauvaise nouvelle ? Ce projet est au stade de l’expérimentation, et les technologies de « capture et de stockage de carbone » (CSC) sont déjà étudiées par le gouvernement canadien pour répondre à son objectif de zéro émission nette d’ici 2050. Voici un premier niveau d’analyse pour présenter les enjeux, et vous donner envie de « creuser » le sujet.
Au fait, les GES c’est quoi ?
Les GES désignent les gaz à effet de serre, à savoir la vapeur d’eau, le dioxyde de carbone (CO2 ou gaz carbonique), le méthane (CH4), le protoxyde d’azote (N2O) et l’ozone (O3). Ces gaz sont présents naturellement dans notre atmosphère mais les activités humaines déséquilibrent l’effet de serre naturel en produisant plus de GES, en particulier par l’exploitation des énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon). Le réchauffement climatique et les catastrophes naturelles sont déjà là pour nous montrer les conséquences de ce cycle infernal.
Une solution : capturer et stocker le carbone
Pour analyser le problème des GES on se concentre sur le CO2 (dioxyde de carbone) car il représente près des 2/3 des émissions mondiales de gaz à effet de serre induites par les activités humaines. Et il reste longtemps dans l’atmosphère (plus de détails).
Et si la solution était tout simplement de stocker et capturer ce carbone plutôt que de le laisser polluer notre atmosphère ? La « séquestration géologique » (stockage ou confinement du dioxyde de carbone) est ainsi une piste théorique étudiée depuis les années 90 et qui a depuis fait l’objet de différentes expérimentations. En 2006, cette piste est officiellement citée dans un rapport du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, qui relève de l’ONU).(détails dans le guide de quantification des émissions de gaz à effet de serre, émis en 2019 par le Ministère de l’environnement et de la lutte contre le changement climatique)
L’entreprise Questerre Energy, établie à Calgary, Alberta, souhaite justement lancer un premier projet de capture et de stockage de carbone (CSC) dans le sous-sol du Québec. On parle là d’un test car cette technologie de séquestration carbone reste critiquée. En effet, plusieurs organismes, comme l’ADEME pointent les limites de cette méthode : la technologie serait « coûteuse et énergivore », les estimations de stockage seraient des estimations théoriques, il existe des risques environnementaux et sanitaires à considérer (notamment les risques de fuites pendant le transport et à long terme pendant le stockage).
Des points de vigilance
Reste que la capture du carbone est une piste intéressante à étudier, en particulier au Québec. Le gouvernement Legault mentionne la CSC dans son « Plan pour une économie verte », comme une mesure « d’atténuation des changements climatiques ». Avec une précision importante : « il est possible de séquestrer les émissions de gaz à effet de serre que l’on n’aura pu ni éviter ni réduire».
Une nuance importante car la CSC est une démarche complémentaire pour lutter contre les gaz à effet de serre, pas une technologie miracle qui résoudra seule le problème des GES. D’après un livre blanc corédigé par Carbone 4 et Net zéro initiative, « Un référentiel pour une neutralité carbone collective » (2020), trois démarches sont nécessaires pour contribuer à la neutralité carbone au niveau mondial. Le Premier pilier est de maîtriser ses émissions de GES. Deuxième pilier : Réduire les émissions des autres. Troisième pilier : Augmenter les puits de carbone.
Le GIEC alerte d’ailleurs sur le fait que les projets de capture permettent à l’industrie pétrolière et gazière de continuer ses activités alors qu’il faudrait y mettre un terme. Au Québec, certains craignent que ces expérimentations autour des CSC ne relancent l’exploration pour les gaz de schiste.
Au Canada, objectif de zéro émission nette
Au Canada, le gouvernement fédéral a d’ores et déjà inscrit les technologies de CSC dans son budget de 2021. Un financement de 319 millions de dollars sur sept ans, à compter de 2021-2022, avec 1,5 million en amortissement restant, est dédié à Ressources naturelles Canada afin d’appuyer les activités de recherche, de développement et de démonstration des technologies de captage, d’utilisation et de stockage du carbone et d’améliorer leur viabilité commerciale.
Ces mesures visent à aider le Canada à réaliser l’objectif de zéro émission nette d’ici 2050 et à positionner le pays comme chef de file dans l’approvisionnement en énergie propre et en nouvelles technologies innovatrices dans le monde.